Du laban au labné, un voyage au Liban
C'est pour avoir partagé la vie d'un libanais que j'ai appris à tant aimer cette cuisine, simple et raffinée tout à la fois. Un mezzé, même modeste comporte toujours cette crème veloutée issue du laban, le labné.
Un proverbe libanais le dit bien, illustrant la générosité des habitants de ce pays;
"L'harirnàl-hassiri wa-r-rachta la bèd d-dar"
"Que les tasses de crème veloutée soient étalées sur la natte et que les assiettes de lentilles aux pâtes se suivent jusqu'à la porte". Ces plats simples que tout foyer modeste peut cuisiner doivent toujours être prêts en abondance. Le labné se consomme aussi bien salé que sucré...
A 18 ans, avec pour tout appareil un réchaud sur pied pour cuisiner, j'ai appris alors à recevoir mes amis étudiants libanais, qui retrouvaient chez moi un peu de la chaleur de leur pays, déjà en guerre, hélas.
- Tout d'abord il me fallait faire du laban [ lait caillé ]. Pour cela, ils me l'ont appris comme ils l'avaient vu faire. Faire chauffer un litre de lait, y plonger le petit doigt ; la température doit être chaude ET supportable. Voilà, il n'y a pas plus empirique ! Verser des cuillerées d'un yaourt [ ou 1 c de présure ] à la surface, entourer le récipient d'une couverture et l'oublier pour la nuit. Le lendemain le lait est devenu litre de laban, ou yaourt, à mettre au frais.
- L'étape suivante est la fabrication du labné [ lait caillé égoutté ], que l'on utilise comme sauce pour les concombres ou pour y tremper des falafels [ céréales en beignets ] ou des rissoles. Le labné est très doux, a perdu toute acidité, du velours... [ Allez donc voir le blog de Ciorane, qui raffole du labné... elle l'utilise à toutes les sauces ! ]
Prendre le laban et y rajouter 1 c à café de sel par litre. Remuer doucement et verser dans une toile fine posée dans une passoire. On peut aussi saupoudrer de sel le linge !
Une autre méthode évite la fabrication du labnan ; mélanger 1 c à café de sel à 5 yaourts natures et laisser égoutter. Personnellement je le fais en grande quantité, avec 15 yaourts...
- Suivant le degré d'égouttage [ après un séjour de deux heures en passoire je suspends tout simplement le linge ] vous obtiendrez du labné khadra [ lait caillé égoutté ] ou du labné malboudé [ lait caillé entassé, c'est à dire encore plus égoutté ] dont la texture est proche d'un fromage blanc solide, mais le goût très différent. On peut à partir de là en faire par exemple des boulettes, que l'on conserve dans de l'huile d'olive. Un délice le matin au petit-déjeuner, avec une pincée de thym.
Je m'en sers aussi en remplacement du classique fromage blanc : par exemple pour cette composition de radis.
- Lors de l'égouttage du labné le liquide qui suinte est du petit lait [ dont on sait qu'il est très riche en calcium ], les libanais s'en servent pour fabriquer du qariché [ fromage cuit ]. Rajouter au petit lait du lait cru [ j'utilise du lait pasteurisé ], dans la proportion d'un quant de litre de lait cru par litre de petit lait. Faire bouillir jusqu'à coagulation. Verser dans une passoire et faire bien égoutter puis refroidir. Il se consomme nature, salé ou sucré et rentre dans la composition de nombreuses recettes. Le qariché se retrouve en Europe sous le nom de "recuite", "sérac" en Savoie, "quark" en Allemagne...
Mes autres recettes libanaises ; beignets au labné, rissoles au fromage, boulettes de fromage à l'huile [ labné bi zayt], taboulé, falafels franco libanaises